Sumario: | Comment expliquer le succès considérable des comédies loufoques américaines des années 1930 ? Rencontres, coups de foudre, ruptures, divorces, remariages... Ces vaudevilles sentimentaux ont répondu aux attentes d'une classe moyenne en plein essor, avide de libéralisation des mœurs, par des intrigues audacieuses, un humour verbal et le recours aux recettes du burlesque muet. Dirigées par des spécialistes du comique (Hawks, LaCava, Leisen, Ruggles...), incarnées par les stars les plus marquantes de cette décennie (Claudette Colbert, Irene Dunne, Clark Gable, Cary Grant, Katharine Hepburn... ), elles forment la comédie screwball, ±sous-genre» prolifique de l'entre-deux-guerres, qui continue d'inspirer aujourd'hui la ±comédie romantique» au cinéma. Elle s'est fixée deux missions contestataires : railler les normes sociales et les représentants de l'ordre établi, et faire un sort aux clichés de la représentation du masculin et du féminin. À la croisée des travaux récents sur le classicisme hollywoodien et le genre au cinéma, cette étude appuyée sur un corpus de cent trente films replace la comédie screwball dans son contexte institutionnel et l'envisage sous son aspect le plus marquant : sa fonction communicationnelle et sociale. Sévèrement contrôlés par la censure interne hollywoodienne, ces films ont développé une esthétique verbale et visuelle spécifique, qui se traduit par une rhétorique du contournement et de l'atténuation. Le genre délivre aussi un message politique, en participant au débat démocratique avec ses interrogations sur les questions d'intimité, d'espace privé et public. Le discours amoureux et conjugal y réaffirme les valeurs fondatrices de la société américaine : la liberté d'expression, le libre consentement et l'engagement contractuel.
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