Sumario: | Ce n'est pas coutume dans notre France centralisée, le premier quotidien ±national» n'est pas parisien, mais régional. Rennes, 2 août 1899 : dans la torpeur de l'été et les passions du procès Dreyfus, paraissaient les 1 800 exemplaires d'un nouveau journal s'ajoutant aux quatre quotidiens déjà publiés dans la ville. Derrière cette feuille de quatre pages, fabriquée dans des conditions artisanales, un petit groupe de turbulents ±abbés démocrates», emmenés par l'abbé Trochu, par un jeune avocat brestois, Emmanuel Desgrées du Lou et par une poignée de notables rennais. Quel rapport entre les deux événements ? Le passant trouve la réponse au 38 de la rue du Pré-Botté à Rennes : la rédaction locale d'Ouest-France occupe l'ancien immeuble de L'Ouest-Éclair. S'il s'agit bien de deux entreprises différentes, au sens substantiel, depuis la rupture d'août 1944, il reste qu'Ouest-France a récupéré alors plus que l'immeuble et le matériel : l'héritage doctrinal et le lectorat de L'Ouest-Éclair, lequel n'avait pas tardé à accéder, dès avant la Première Guerre mondiale, aux tout premiers rangs des quotidiens de province, rayonnant sur tout l'Ouest armoricain. Le secret de celle réussite tenait sans doute à un double pari. Pari entrepreneurial : celui du passage au stade de l'entreprise industrielle et de la modernité technique, sans renier les valeurs du catholicisme social, au principe de l'expérience. Pari éditorial : contribuer à faire accepter la République dans une région qui, les souvenirs de la Révolution et de la chouannerie aidant, était loin d'y être partout disposée.
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