Sumario: | Comment lire Derrida lorsqu’on n’est pas derridien? Sa philosophie exclut par avance toute lecture qui serait surplombante, que celle-ci relève de l’histoire de la philosophie ou de toute autre approche métaphilosophique. Mais l’impertinence exigerait tout autant le renversement de la question : Comment lire Derrida quand on est derridien? On ne peut qu’écrire avec lui, comme lui. N’a-t-il pas en effet disqualifié la différence même entre écriture et commentaire? Comment dès lors l’analyser sans se laisser contaminer par les effets déconstructifs induits par son écriture, ni le trahir par une distance telle qu’elle ferait perdre la spécificité de son style philosophique? C’est le défi que les contributeurs de ce livre s’efforcent de relever en proposant des analyses croisées d’Éperons. Les styles de Nietzsche dont la lecture s’avère à cet égard particulièrement pertinente puisqu’elle pose directement – tout en les liant à la question du féminin et de la différence sexuelle – les questions du style et de l’herméneutique. Les études proposées, inscrites dans différents champs disciplinaires – philosophie, analyse de discours, sémiotique et stylistique –, permettent de mesurer à quel point l’on peut faire droit à l’originalité de Derrida sans le poser comme indéchiffrable, et mettre à jour les caractéristiques d’une parole philosophique qui, tout en mimant la pratique traditionnelle du commentaire, entend produire un nouveau mode d’énonciation philosophique.
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