Sumario: | Entre l’entrée dans la guerre de la Ligue d’Augsbourg en 1688 et la fin de la guerre de Succession d’Espagne en 1714, la France connaît les deux conflits les plus difficiles et les plus disputés du long règne martial de Louis XIV. Combattant les armées de l’Europe coalisée sur toutes ses frontières terrestres et maritimes, mais également outre-mer, le royaume souffre d’un contexte géostratégique défavorable (c’est le début de la « seconde guerre de Cent Ans » contre l’Angleterre de la Glorieuse Révolution) autant que d’une situation financière de plus en plus dramatique, alors même que la crise démographique de 1693-1694 puis le grand hiver de 1709 s’abattent sur les campagnes. Malgré les victoires remportées par ce « géant du Grand Siècle » qu’est plus que jamais l’armée du Roi-Soleil, le demi-siècle de succès presque continus inauguré par la bataille de Rocroi prend brutalement fin avec les catastrophes de Blenheim, Ramillies, Turin et Audenarde, avant que la résistance offerte à Malplaquet et la manœuvre de Denain ne permettent à la France menacée d’invasion de sauver l’essentiel au congrès d’Utrecht. Cette face sombre de l’histoire militaire du règne du Grand Roi, moins connue que le temps des conquêtes célébrées par les décors de Versailles ou les toiles de Van der Meulen, a fait l’objet ces dernières années de nombreux travaux qui, loin de résumer cette période aux limites de la guerre de siège et à la médiocrité de généraux courtisans, en soulignent l’importance dans l’histoire longue des pratiques et de la conduite de la guerre. Croissance inédite des effectifs et de l’administration militaire, mutations de l’armement et des dispositifs tactiques avec l’apparition du couple fusil-baïonnette et le triomphe de l’ordre mince, impact accru de la guerre sur les sociétés à travers la création de la milice, des campagnes marquées par une grande violence (sac du Palatinat, guerre des Camisards) et la mobilisation des économies mais aussi des esprits, mondialisation…
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