Sumario: | Créée en mai 1590 dans l’urgence d’une épidémie de peste naissante, l’infirmerie de peste des Fédons ne fut utilisée que durant trois à quatre mois puis disparut ensuite rapidement du paysage et de la mémoire des habitants de la bourgade provençale de Lambesc. C’est à l’occasion des travaux du TGV Méditerranée entrepris en 1996 qu’une opération de sauvetage archéologique, conduite par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), permit la découverte du cimetière associé à cette infirmerie. La fouille exhaustive de l’espace funéraire a fourni de nombreux témoignages matériels autour desquels les compétences les plus diverses ont été déployées pour retracer l’histoire de cette infirmerie et son fonctionnement mais aussi pour caractériser ses patients. Il apparaît ainsi que, lieu de quarantaine autant que lieu de soin, l’infirmerie de peste était régie par des pratiques et des objectifs sanitaires bien éloignés des tableaux catastrophistes souvent dressés dans la littérature et l’art figuré. L’analyse de cet échantillon ostéologique de 133 individus, unique en son genre, a offert l’opportunité d’appréhender les comportements funéraires, l’organisation et la gestion des morts dans ce contexte culturel très particulier. La mise en œuvre de la plupart des outils de l’anthropologie (démographie, paléopathologie, etc.) a également permis de préciser le recrutement de l’infirmerie - toute la population infestée n’y trouvait pas place - et la ponction démographique opérée par l’épidémie - les populations et les autorités réagissaient différemment selon l’espacement et l’intensité des crises. L’échantillon osseux a également été mis à profit pour des investigations originales dans le domaine de la biologie moléculaire, en vue de l’identification du bacille de la peste ou de la détermination de la saison de la mort à partir du cément dentaire.
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