Sumario: | Jean Vauthier est un poète de la scène. Auteur d’une œuvre ardente, toute pétrie de sueur et de sang battant, il jette sur le plateau des âmes incandescentes. En musicien du théâtre, il fait vibrer les corps et les voix, toujours en démesure. À l’heure de son centenaire, Vauthier mérite d’être redécouvert. Avec Beckett, Genet, Ionesco, Schéhadé ou encore Audiberti, l’auteur de Capitaine Bada et du Sang appartient à la génération des dramaturges du Théâtre Nouveau qui a émergé sur les scènes parisiennes après la Seconde Guerre mondiale. Commencée en 1951, sa riche carrière théâtrale le voit collaborer avec certains des plus grands de son époque, débutants prometteurs ou valeurs reconnues - Gérard Philipe, Jean-Louis Barrault, Marcel Maréchal, Jorge Lavelli, Claude Régy, Patrice Chéreau. Son œuvre est d’une incontestable originalité. Auteur classé dans l’avant-garde, mais qui déclare ignorer tant Beckett que Ionesco, à l’écart de la vogue brechtienne, amoureux du verbe poétique à l’heure de la tragédie du langage, novateur peu préoccupé d’innovation, Vauthier n’a voulu être que Vauthier. À travers les empêchements de tous ordres, il a su construire une oeuvre forte et sans équivalent, s’attachant à ne suivre qu’un seul fil, celui que Schéhadé, cousin lointain, nomme « le fil d’or de la poésie » - mais d’une poésie profondément dramatique. « Vouloir être de son temps, c’est déjà être dépassé », disait Ionesco. L’auteur de Capitaine Bada n’a assurément pas voulu être de son temps. Si Ionesco dit vrai, Vauthier a sans doute ses chances, pour aujourd’hui ou pour demain.
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