Sumario: | Au cours des dernières décennies, le développement d’une histoire sociale de la culture écrite a profondément renouvelé le maniement de ces documents essentiels que sont pour les historiens les chartes et les cartulaires. Leur valeur, évidente en ont que réceptacles d’informations, est démultipliée dès lors que l’on met l’accent sur la production et la conservation des actes comme facteurs actifs des processus sociaux et, partant de là, lorsqu’ils sont considérés comme des instruments de pouvoir. Chartes, cartulaires, archives se révèlent ainsi à l’historien comme des canaux de transmission des idées grâce à la capillarité offerte par des technologies spécifiques auxquelles ont accès, à des degrés différents, une multitude d’acteurs directs et indirects. Dans les sociétés médiévales les relations de pouvoir se tissent bien évidemment au gré de la circulation des biens, de la résolution des conflits, des concessions de juridiction, mais aussi, de manière beaucoup plus subliminale, par le biais de la transmission des représentations de l’autorité qui imprègnent le message diplomatique. Le document, lui-même allégorie d’un ordre social et d’une conception du pouvoir, a cette capacité à les enraciner dans la société. Les douze études réunies dans ce volume proposent une réflexion collective selon deux échelles temporelles : la vie immédiate et la seconde vie des actes. Élaborés dans des contextes historiques et par des acteurs concrets, ils sont destinés originellement à produire leurs effets sur une réalité attendue. Mais les avatars de leur conservation dans les archives, leur réplication au travers des cartulaires et des copies, leur remploi dans des contextes postérieurs, dépassent le plus souvent la capacité de prévision de leurs auteurs. Outils précieux de la défense des droits et privilèges, les actes connaissent de nombreuses vies entre les mains de leurs possesseurs successifs et participent avec récurrence au processus de (re)production de la mémoire d’un…
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