Sumario: | « Un nain est aussi bien un homme qu’un géant ; une petite République n’est pas moins un État souverain que le plus puissant Royaume » : à l’époque moderne, selon les termes du jurisconsulte Neuchâtlelois Emer de Vattel, la distinction hiérarchique entre les puissances européennes est subordonnée au respect de l’égalité juridique des États souverains. Des Lumières à la Révolution, la tension entre l’égalité et la distinction organise les relations diplomatiques asymétriques de la République de Genève avec la France, du nain avec le géant. À partir des années 1730, l’intervention française dans la pacification des troubles politiques de Genève éprouve la maxime de Vattel. Interprétée au prisme des pratiques diplomatiques, l’histoire politique de la petite République réformée décline les multiples ressources que mobilise l’État le plus faible pour amortir la prétention hégémonique du plus fort. Après 1792, les relations diplomatiques franco-genevoises glissent de l’idéal de la ligue républicaine des peuples libres à l’aspiration impérialiste de la Grande Nation qui justifie l’annexion de la République de Genève à la France du Directoire finissant. La diplomatie est un espace négocié de pratiques sociales de l’altérité. Ministres publics de second rang et agents privilégiés de la diplomatie française à Genève, les résidents expérimentent l’interaction entre leur culture politique et le républicanisme classique dont certaines caractéristiques survivent à la Révolution genevoise de 1792. Langage symbolique, ensemble de gestes ritualisés résultant d’une négociation permanente, le cérémonial diplomatique permet d’évaluer le dialogue entre les cultures politiques française et genevoise au XVIIIe siècle, circulation ininterrompue de représentations réciproques. Audiences solennelles, dons diplomatiques, fêtes royales ou républicaines : à la croisée du cérémonial d’État, du modèle mondain de la politesse, puis de la rhétorique révolutionnaire de la fraternité, l’étiquette…
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